Les femmes continuent de recevoir un salaire inférieur à celui des hommes. Leur situation en matière de retraite n’a guère changé non plus. Au contraire, la discrimination salariale augmente même en Suisse. Pour la grève féministe, on demande donc la revalorisation financière et sociale du travail effectué par les femmes.
1 : Égalité salariale : l’écart continue de se creuser
En 2021, les femmes en Suisse gagnaient 17,7% de moins que les hommes. La Suisse occupe ainsi la troisième et dernière place au niveau européen. Et ce n’est pas tout : l’écart salarial entre les genres a même augmenté de 0,3 % depuis 2012. Il n’est donc pas étonnant que l’égalité salariale doive être une des revendications principales en vue du 14 juin.
Selon le Bureau fédéral de l’égalité, environ la moitié de la différence de salaire entre femmes et hommes n’est pas explicable. Le désavantage structurel des femmes se manifeste également dans les facteurs explicables : la position professionnelle, les années de service ou le niveau de formation dépendent souvent de la personne qui assume le travail de soin dans la famille. Le travail non rémunéré est toujours effectué en grande partie par les femmes. Cela a pour conséquence qu’elles sont souvent actives dans des professions moins bien rémunérées et qu’elles doivent travailler à temps partiel. De ce fait, les femmes ont également moins de chances d’évoluer professionnellement.
2 : Des salaires plus élevés et des salaires minimums généralisés
L’égalité salariale ne suffit pas à elle seule à améliorer de manière significative la situation des femmes. C’est pourquoi la grève féministe demande également une augmentation ciblée des salaires dans les branches où les salaires sont bas et moyens et où la proportion de femmes est élevée. Cela implique des salaires mensuels minimaux généralisés de 4 500 francs pour toutes et tous et de 5 000 francs pour les personnes ayant terminé leur apprentissage professionnel.
Dans les branches où la proportion de femmes est élevée, les salaires sont souvent plus bas. C’est justement là que les salaires minimaux peuvent améliorer la situation. Selon Michael Siegenthaler, responsable du domaine de recherche « Marché du travail » au Centre de recherches conjoncturelles KOF, les salaires minimaux permettent d’augmenter la masse salariale globale et contribuent à une plus grande égalité salariale. Les préjugés selon lesquels les salaires minimaux entraîneraient des suppressions d’emplois et auraient donc des effets négatifs sur le marché du travail ne sont guère confirmés par la science économique. Dans son interview à « direct », Michael Siegenthaler souligne : « Il existe désormais des centaines d’études sur les effets des salaires minimums sur l’emploi dans différents contextes. La grande majorité des chercheur-euses s’accordent à dire que les salaires minimaux ne sont pas des tueurs d’emplois ».
Le 18 juin, des votations sur les salaires minimums municipaux sont prévues à Zurich et Winterthur. Grâce au compromis sur les salaires minimums dans la ville de Zurich, 17 000 personnes qui gagnent aujourd’hui moins de 4000 francs par mois recevront désormais un salaire minimum de 23,90 francs par heure. Plus de 60 % de ces employé-es ont plus de 30 ans et sont des femmes. Le compromis zurichois a été soutenu par le PS, le Centre/PEV, les Vert-es et la gauche alternative au sein du législatif. Caritas Zurich, l’Association des employé-es de commerce de Zurich et de nombreux-ses entrepreneur-es zurichois-es soutiennent également le projet.
3 : Réduction continue des rentes
Un salaire plus faible entraîne une pension plus faible. La situation des femmes en matière de retraite ne s’est guère améliorée depuis la dernière grève de 2019. Et ce, bien que les élu-es de droite et du centre aient promis, lors de l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes, de s’attaquer à la situation particulière des femmes avec la réforme des caisses de pension. Mais le projet élaboré n’améliore pas la situation des retraites des personnes à bas revenus ou des employé-es à temps partiel. Cela concerne donc surtout les femmes, qui travaillent nettement plus souvent que les hommes dans des branches à bas salaires et à temps partiel. À cela s’ajoutent les interruptions de l’activité professionnelle pour cause de garde d’enfants, qui ne sont pas compensées dans le deuxième pilier - contrairement au premier pilier – par des bonifications pour tâches éducatives et d’assistance. C’est précisément là que les suppléments de rente auraient dû améliorer sensiblement la situation financière des personnes ayant des salaires plus bas. Or, c’est le contraire qui se produit : le projet entraîne une baisse des rentes. Les syndicats et le PS ont donc lancé un référendum contre cette mesure.
Une des revendications de la Grève féministe consiste donc en des rentes suffisantes pour vivre, sans nouvelle augmentation de l’âge de la retraite. Ces revendications ne sont malheureusement pas entendues par la majorité bourgeoise du Parlement, non seulement en ce qui concerne le projet de réforme des caisses de pension, mais également lorsqu’il s’agit de renforcer l’AVS. Le Parlement ne veut rien savoir d’une compensation du renchérissement pour les rentes AVS et la majorité bourgeoise rejette également l’initiative pour une 13e rente AVS. Et ce, bien que le renforcement de l’AVS puisse améliorer la situation des rentes des femmes. En effet, une femme sur quatre n’a pas de deuxième pilier.
Mais le coup fatal a été donné cette semaine : le Conseil national a de facto soutenu l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes et des hommes à 66 ans. Il a renvoyé « l’initiative sur les rentes » en Commission pour qu’elle élabore un contre-projet. Et ce, bien que le Conseil fédéral, le Conseil des Etats et la commission consultative rejettent