Déjà 23 féminicides en Suisse : le PS Suisse lance une initiative


Tous les 11 jours, une femme meurt en Suisse victime de violences sexistes et sexuelles (VSS) — et il n’existe toujours pas de mesures efficaces pour les protéger et prévenir ces crimes. Les Femmes socialistes suisses et le PS Suisse demandent désormais à la Confédération d’agir en lançant une initiative.

Cette année, 23 femmes et filles ont déjà été tuées par des hommes en Suisse. Cela représente une augmentation significative par rapport aux années précédentes. Les dernières statistiques criminelles confirment cette tendance alarmante : les crimes violents, en particulier les viols et les lésions corporelles graves, continuent également d’augmenter.

Féminicides : le point culminant de la spirale de la violence et le retour en force de la droite conservatrice

Les féminicides ne se produisent pas dans le vide. Ils constituent le tragique aboutissement d’une spirale de violence profondément enracinée dans la société. Au cœur de celle-ci se trouve une structure patriarcale qui dévalorise et objectifie systématiquement les femmes. En raison notamment de la montée en puissance actuelle des partis d’extrême droite et du retour en force des idées conservatrices, les droits des femmes, des personnes queer et transgenres sont soumis à une pression croissante. Aux États-Unis, l’accès à l’avortement a ainsi été fortement restreint. En Italie, à cause d’une nouvelle loi du gouvernement Meloni, les opposants à l’avortement sont désormais autorisés à harceler et à intimider les femmes enceintes directement devant les cliniques.

En Suisse aussi, le retour en force des idées conservatrices se fait sentir. Depuis le virage à droite du Parlement lors des élections de 2023, il est pratiquement impossible de trouver des majorités pour des projets importants en matière de politique d’égalité. La majorité de centre-droit au Parlement préfère dépenser des milliards pour l’armée. En revanche, elle abandonne les victimes de violences sexistes et sexuelles en refusant d’allouer suffisamment de fonds à la protection et à la prévention.

La Suisse en état d’alerte — mais sans moyens supplémentaires

Dès juillet, les expert-es en matière d’égalité de la Confédération ont exigé des mesures concrètes contre le nombre croissant de féminicides, compte tenu des chiffres alarmants. Leur appel s’adressait à la Confédération, aux cantons et aux communes : seule une action coordonnée à tous les niveaux permettrait de lutter efficacement contre la violence à l’égard des femmes. Des mesures telles que l’amélioration de l’évaluation des risques et le renforcement de la prévention de la violence sont actuellement à l’étude.

Aucun financement supplémentaire n’est prévu pour les foyers d’accueil pour femmes, les programmes de prévention ou les services de conseil aux victimes. Or, ces domaines sont de manière chronique sous-financés et, selon les expert-es, essentiels pour protéger les femmes concernées avant qu’une agression mortelle ne se produise.

Initiative du PS : la Confédération doit prendre ses responsabilités

Face à l’escalade de la situation, le PS Suisse et les Femmes socialistes suisses ont annoncé le lancement d’une initiative populaire. Il est prévu d’élaborer une loi nationale comportant trois éléments centraux :

Premièrement, la Constitution doit expressément obliger la Confédération et les cantons à lutter activement contre la violence sexiste.

Deuxièmement, l’initiative exige des normes minimales contraignantes en matière de protection des victimes et de prévention — une mesure qui, compte tenu des grandes différences entre les cantons, est attendue depuis longtemps. Actuellement, les cantons sont responsables de la protection des victimes de violence. Cela signifie qu’aujourd’hui, l’accès des femmes concernées à un lieu de protection ou à un centre de consultation dépend fortement de leur lieu de résidence. Dans certaines régions, l’offre en foyers pour femmes et en lieux d’accueil est dramatiquement insuffisante.

Troisièmement, la Confédération doit prendre en charge le financement. Le PS Suisse estime ce coût à environ 500 millions de francs par an. Cet argent doit notamment être investi dans les foyers pour femmes, les systèmes d’appel d’urgence, le travail avec les auteurs de violences, la formation initiale et continue de la police et de la justice, ainsi que dans le travail de prévention dans les écoles.

L’initiative ne vise pas seulement à réagir à la violence, mais aussi à modifier les structures sociales qui la rendent possible.

L’Espagne : un modèle dans la lutte contre la violence sexiste

Un coup d’œil sur l’Espagne montre que la lutte contre les violences sexistes et sexuelles est possible. Au cours des 20 dernières années, l’Espagne a réussi à réduire d’un tiers le nombre de féminicides. Le tournant s’est produit en 1997, lorsque Ana Orantes, âgée de 60 ans, a parlé de la violence de son ex-mari dans une interview télévisée et a été assassinée par celui-ci quelques jours plus tard. Les protestations nationales ont conduit à la prise de conscience que la violence à l’égard des femmes n’est pas un problème privé, mais un problème social.

En 2004, le Parlement espagnol a adopté un ensemble de lois comprenant principalement des réformes pénales. L’État a défini la violence à l’égard des femmes comme un délit à part entière et a durci les peines infligées aux auteurs. En outre, des tribunaux spécialisés, appelés « chambres spéciales », ont été créés. Ils traitent exclusivement les affaires de violence sexiste et sont composés de personnel spécialement formé.


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