Elon Musk et Mark Zuckerberg figurent parmi les hommes les plus puissants du monde. En plus de leur statut de milliardaire, ils possèdent et contrôlent les réseaux sociaux X, Instagram et Facebook. Musk et Zuckerberg contrôlent donc en tout temps qui voit quoi sur son « feed » personnalisé.
Ce que l’on voit influence la formation de son opinion, aussi politique. D’après une étude réalisée en Suisse, la majorité des jeunes adultes reste au courant de l’actualité via les réseaux sociaux. En soi, cela ne constituerait pas un problème. Seulement, Musk et Zuckerberg se mêlent activement de la politique aux États-Unis et propagent ouvertement des idées de droite et d’extrême droite. Parallèlement, il n’est presque plus possible de faire la distinction entre les faits vérifiés et les fake news. De plus, X et Facebook ont totalement distordu la signification du droit de s’exprimer librement, tolérant des discours haineux et discriminatoires sur leurs plateformes.
Des algorithmes partisans
La Commission fédérale des médias a sonné l’alerte. D’après ses expert-es, les réseaux sociaux représentent un danger pour la démocratie suisse. Car les algorithmes sur Instagram, X ou TikTok peuvent désinformer, polariser et radicaliser leurs utilisateurs et utilisatrices. De plus, à cause des parts du marchés immenses que les entreprises possèdent, il est difficile pour des alternatives de s’établir.
Que peut donc faire la Confédération ? Les expert-es de la Cofem présentent des possibilités de gouvernance dans leur rapport. Une suggestion serait par exemple le développement du droit de concurrence pour les adapter aux spécificités du marché des plateformes sociales. La Cofem suggère aussi de forcer les plateformes à mettre en place un système de recommandation de contenu sans profilage : cela pourrait réduire la radicalisation et la polarisation sur les réseaux sociaux.
La Confédération traîne
Le conseiller national Jean Tschopp (VD) avait en février dernier demandé l’avis du Conseil fédéral précisément à ce sujet. Dans sa réponse, ce dernier indique avoir commencé un projet de consultation, inspiré par le « Digital Services Act » de l’Union européenne – que le groupe parlementaire du PS avait motionné de reprendre. Ce projet vise à renforcer « les droits des utilisateurs face aux intermédiaires » et aussi à mieux protéger les consommateur-trices « contre le discours de haine numérique ».
Quant aux plateformes comme X, Facebook ou Instagram, le Conseil fédéral veut les soumettre à une surveillance et introduire des mécanismes sensés vérifier le « respect des devoirs de diligence ». Ainsi, ce projet renforcerait « les droits fondamentaux de la communication et le bon fonctionnement du débat public ».
Cela fait presque un an que le Conseil fédéral a répondu à l’interpellation de Jean Tschopp. Un premier projet devait être livré fin mars 2024, puis à l’automne 2024. Entretemps, les États-Unis ont élu un président d’extrême droite, aidé et influencé par Elon Musk et les élites de la Silicon Valley. Et le centre-droit suisse refuse toute aide économique pour les médias.
Pire encore, le service public médiatique risque d’être démantelé par l’initiative anti-SSR, actuellement discutée au Parlement. Cela serait irresponsable dans une époque où le risque de désinformation est plus grand que jamais et la démocratie est mise sous pression. La Cofem, elle aussi, recommande de l’aide au journalisme direct et une réinterprétation moderne du service public.