L’ancien porte-parole du Conseil fédéral estime qu’une nouvelle votation sur les F-35 serait pertinente

Afin de ne pas perdre la confiance de la population, il est nécessaire de procéder à un nouveau vote sur l’acquisition des F-35, estime Oswald Sigg, ancien vice-chancelier et porte-parole du Conseil fédéral.

Sur un ciel nuageux, un avion de chasse furtif F-35 noir en vol à droite, et à gauche Oswald Sigg, un homme âgé aux cheveux gris et à la moustache, portant des lunettes et détaché sur un contour blanc.
Images : keystone/EPA/Yoan Valat/Anthony Anex

« direct » : Les États-Unis ont une conception différente de la Suisse de ce qu’est un « prix fixe » pour les avions de combat F-35. Des coûts supplémentaires de plus d’un milliard de francs sont désormais à craindre. Qu’avez-vous pensé lorsque vous avez appris cette nouvelle ?

Oswald Sigg : Je vous répondrai volontiers en tant que citoyen, et non en tant qu’ancien porte-parole du Conseil fédéral. En effet, je ne comprends pas comment un « malentendu » aussi grave a pu se produire. De telles négociations sont toujours consignées dans un procès-verbal — chaque mot est consigné par écrit. Je ne peux pas imaginer qu’il en ait été autrement lors de ces négociations. C’est pourquoi je trouve inacceptable qu’on dise aujourd’hui qu’on ne sait pas exactement ce que la partie américaine entendait par « prix fixe ». Les scandales liés à l’acquisition d’avions de combat ont toutefois une certaine tradition en Suisse. Il suffit de penser à l’affaire Mirage dans les années 60. Le plafond des coûts avait alors été largement dépassé et le Conseil fédéral avait finalement dû redimensionner considérablement le projet.

« direct » : Apparemment, l’ancienne cheffe du DDPS, Viola Amherd, savait depuis l’été 2024 qu’il pouvait y avoir un malentendu sur la notion de prix fixe. Or, elle n’en a informé l’ensemble du Conseil fédéral qu’en décembre. Il s’est ensuite écoulé 6 mois avant que le public soit mis au courant. Comment expliquez-vous ce délai ?

Oswald Sigg : Pour moi, la responsabilité de toute cette affaire n’incombe pas seulement à Viola Amherd, mais aussi au Conseil fédéral en tant que « collège ». Dans une affaire de cette importance et de cette envergure financière, le principe du gouvernement collégial aurait dû mieux fonctionner. L’ensemble du Conseil fédéral aurait dû soutenir davantage Viola Amherd. Il ne s’agit pas ici de la personne de Viola Amherd, mais du principe de collégialité.

« direct » : Le Conseil fédéral dans son ensemble n’a donc pas assumé ses responsabilités ?

Oswald Sigg : Il y a toujours des dossiers qui revêtent une grande importance politique et qui doivent être portés par le Conseil fédéral dans son ensemble. L’acquisition de chasseurs à réaction pour 6 milliards de francs est l’une de ces affaires qui ne concernent pas uniquement le DDPS. L’ensemble du gouvernement doit la soutenir. Je trouve inacceptable la manière dont Viola Amherd a été traitée. Elle a dû quitter le Conseil fédéral les larmes aux yeux — je n’ai jamais vu cela auparavant. J’ai l’impression que les autres membres du Conseil fédéral l’ont abandonnée dans cette affaire, alors qu’ils savaient parfaitement où cela allait mener.

« direct » : En septembre 2021, les électeur-trices ont approuvé à une très faible majorité de 50,1 % l’acquisition d’avions de combat pour un montant maximal de 6 milliards de francs. Si, finalement, l’achat des F-35 est plus coûteux, le vote doit-il être répété ?

Oswald Sigg : Le Conseil fédéral peut simplement continuer de cette manière et essayer de négocier le prix avec les États-Unis. Actuellement, il semble en effet que notre gouvernement souhaite procéder à l’acquisition comme prévu. Cela serait toutefois très problématique pour la confiance dans les institutions fédérales.

« direct » : Le Conseil fédéral devrait donc permettre une nouvelle votation ?

Oswald Sigg : S’il souhaite réellement acheter les F-35, je pense que d’un point de vue politique, il serait pertinent de consulter à nouveau la population, d’autant plus que le résultat du premier vote était très serré. Sinon, la confiance de la population dans les institutions politiques s’en trouverait affaiblie. Toutefois, un accord du Parlement serait nécessaire pour organiser un nouveau vote.


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