Imposition du logement : 5 choses à savoir

Cette année encore, la Suisse votera sur une réforme de l’imposition du logement. Mais de quoi s’agit-il ? Qui profite, qui est perdant-e ? « direct » vous explique le projet.

Des maisons de famille en Suisse vues d'en-haut.
Image : keystone/Manuel Geisser

Une réforme de l’imposition du logement fera l’objet d’un vote cette année encore. Le Parlement veut faire plaisir aux propriétaires, car la suppression de la valeur locative fait partie du paquet. Voici ce qu’il faut savoir :

1. Inégalités entre propriétaires et locataires

Les loyers explosent en Suisse. Mais les chanceux-ses qui possèdent leur appartement ou maison dépensent, proportionnellement à leur revenu, nettement moins qu’il y a 15 ans pour leur logement. Ceci grâce à la tendance des taux intérêts à la baisse, qui dure depuis quelques années. Cette inégalité entre propriétaires et locataires s’aggravera encore plus avec la réforme de l’imposition du logement. Pourquoi ? Car celle-ci prévoit la suppression de la valeur locative.

Comment fonctionne la valeur locative?

Les propriétaires de logements ne doivent pas payer de loyer et peuvent déduire des impôts le taux d’intérêt hypothécaire et les coûts de rénovations et d’assainissements de leur logement. Ils et elles profitent donc d’un avantage financier par rapport aux personnes qui louent leur logement. En plus, habiter dans sa propriété est considéré comme un rendement sur le revenu. C’est pourquoi il existe une taxe sur la valeur locative : celle-ci est un loyer fictif que les propriétaires devraient payer s’ils louaient leur propriété pour y habiter. La valeur locative est estimée par l’administration fiscale. Cette valeur, et donc sa taxation, seraient supprimées, mais quelques déductions des impôts pour les propriétaires resteraient possibles.

Qui profite donc de la réforme ? En première ligne, ce sont les propriétaires aisé-es et d’un certain âge qui ont déjà remboursé une grande partie de leur hypothèque.

Et qui est perdant-e ? Les locataires, qui doivent toujours payer leur loyer et qui paient des impôts sur les revenus de leur patrimoine. Ils et elles ne profitent pas d’allègements fiscaux.

La réforme prévoit aussi que les taux d’intérêts hypothécaires ne soient plus déductibles. Une mauvaise nouvelle pour des jeunes propriétaires avec de jeunes enfants, car ces personnes devront payer plus d’impôts que la génération de propriétaires précédente.

2. Perte de recettes fiscales : 1,7 milliards de francs

La réforme conduira à une perte de recette d’environ 1,7 milliard de francs pour la Confédération, les cantons et les communes. Les finances fédérales et cantonales en souffriront, mais la majorité bourgeoise du Parlement a refusé de rendre le projet neutre sur le plan fiscal. Des mesures de démantèlement dans les secteurs de l’éducation, de la culture, de la coopération au développement ou de l’égalité suivront inévitablement afin d’égaliser les pertes.

C’est pourquoi les cantons montagnards en particulier se prononcent contre le projet. Dans ces régions, plus de personnes habitent dans des logements en propriété que dans les régions urbaines. De plus, le Valais ou les Grisons subiront des pertes fiscales d’environ 120 millions de francs, et ce seulement à cause de la suppression de la valeur locative sur les résidences secondaires.

3. Moins d’assainissements respectueux du climat

Avec l’ancienne régulation, les propriétaires pouvaient déduire de leurs impôts des assainissements ou des rénovations. Cela ne serait plus le cas avec le nouveau projet de loi. De nombreux propriétaires pourraient donc renoncer à effectuer des rénovations nécessaires pour le climat, car celles-ci ne seraient plus fiscalement avantageuses. Cela menace le progrès des rénovations énergétiques dans le domaine immobilier, en plus des objectifs climatiques de la Suisse.

4. Travail dissimulé en augmentation

Selon des expert-es, la suppression de la valeur locative entraînerait une augmentation du travail au noir avec elle. Si les rénovations et assainissements ne sont plus déductibles, les propriétaires ne doivent plus soumettre des factures nettes. Cela signifierait plus de paiement en espèces pour des travaux de rénovations et donc stimuler l’économie dissimulée.

Friedrich Schneider, expert international pour l’économie souterraine, a estimé l’augmentation de cette dernière pour le Tages-Anzeiger : environ 450 à 650 millions de francs annuellement. Aujourd’hui, la part de l’économie dissimulée en Suisse est très basse en comparaison avec les pays voisins, mais ceci pourrait très vite changer.

5. Un obscur nouvel « impôt réel »

La suppression de la valeur locative est liée à l’introduction d’un « impôt réel » opaque. Il s’agit d’une nouvelle imposition sur les résidences secondaires que les cantons pourraient prélever. Le but serait de compenser les pertes de recettes cantonales.

Mais les détails de la taxe ne sont pas encore clairs. 19 des 26 cantons rejettent le changement de régime : surtout parce que l’impôt conduirait à de nouvelles mesures de contournement et d’optimisation qui ne peuvent être que difficilement résolues dans le cadre de l’exécution. Les propriétaires pourraient aussi subir un désavantage à cause de cette nouvelle taxe, selon sa conception.


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