Médicaments : Novartis demande encore plus d’argent malgré des prix déjà élevés

Les prix élevés des médicaments sont en partie responsables de l’augmentation des primes d’assurance maladie. Bien que la Suisse soit déjà un îlot de cherté, les groupes pharmaceutiques suisses demandent maintenant encore plus d’argent. Est-ce justifié ?

Images : keystone/Manuel Geisser/AP/Alex Brandon

« Les prix des médicaments sont beaucoup trop bas », s’est plaint Vasant Narasimhan, chef de Novartis, dans une interview accordée à la NZZ fin septembre. Les entreprises pharmaceutiques sont confrontées à des coûts de production et de recherche élevés. De plus, selon Vasant Narasimhan, la politique douanière de Donald Trump constitue un fardeau supplémentaire et menace les bénéfices.

Cela ne plaît pas aux responsables politiques. La présidente du PS Suisse, Mattea Meyer, a vivement critiqué le directeur de Novartis : « C’est comme si Novartis, Roche et les autres avaient le droit fondamental de réaliser une marge bénéficiaire de 30 % à nos dépens. » Elle avait déjà qualifié de scandaleux le fait que le PDG de Novartis empoche un salaire annuel de 19,2 millions alors que de nombreux assuré-es ne savent pas comment payer leurs primes.

Le débat sur la hausse des prix des médicaments est lancé, mais qui a raison ? « direct » vous présente les faits.

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La Suisse a les prix des médicaments les plus élevés d’Europe

Une étude du Surveillant des prix montre que la Suisse a de loin les prix des génériques les plus élevés d’Europe. Parmi les 15 pays étudiés, le Royaume-Uni, la Suède et le Danemark ne paient qu’environ un cinquième du prix payé en Suisse. L’étude indique également : « Le médicament générique le moins cher en Suisse coûte en moyenne plus de deux fois et demie plus que dans les 15 pays comparés. »

Graphique à barres verticales intitulé « Prix des médicaments génériques en Suisse comparés à ceux des pays de l’UE – Les Suiss-esses paient le plus ». Chaque barre indique, en pourcentage du prix suisse (100 %), le niveau des tarifs dans différents pays :• Suisse : 100 % • Norvège : 82 % • Espagne : 60 % • Italie : 55 % • Allemagne : 53 % • Finlande : 48 % • Autriche : 47 % • Belgique : 46 % • France : 45 % • République tchèque : 30 % • Irlande : 28 % • Danemark : 22 % • Portugal : 22 % • Grande-Bretagne : 18 % • Suède : 17 % • Pays-Bas : 8 % Un encart signale que la moyenne des pays de l’UE est de 41 % du prix suisse. Source : Surveillant des prix.
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Les médicaments représentent une part de plus en plus importante des primes d’assurance maladie

Les chiffres de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) montrent que les prix des médicaments constituent l’un des postes budgétaires les plus importants de l’assurance maladie obligatoire. Ils représentent environ un cinquième du coût total de l’assurance de base obligatoire, et la tendance est à la hausse.

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Au cours des dix dernières années seulement, les prix ont augmenté de près de 50 %. La manière dont ces prix sont négociés entre les entreprises pharmaceutiques et les autorités fédérales reste en outre largement mystérieuse. Ainsi, alors que les coûts pour les assuré-es augmentent, les groupes pharmaceutiques continuent de générer d’importants bénéfices pour leurs actionnaires. Le manque de transparence du système de fixation des prix se fait finalement au détriment des assuré-es.

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Les entreprises pharmaceutiques ont des marges bénéficiaires très élevées

Ce que l’on sait, c’est que les marges bénéficiaires sur les médicaments sont exorbitantes. L’organisation non gouvernementale « Public Eye » a ainsi calculé des marges bénéficiaires de 40 à 90 % sur les médicaments contre le cancer.

Selon le journal Handelszeitung, les bénéfices de Roche représentent 50 % de son chiffre d’affaires total. Cela signifie que près de la moitié du prix des médicaments payés par les assuré-es correspond à des bénéfices. De plus, malgré l’incertitude liée aux droits de douane américains, Roche a récemment considérablement augmenté son chiffre d’affaires et ses bénéfices. Selon les résultats publiés par le groupe, cela s’explique par la forte demande de nouveaux médicaments. Il en va de même pour Novartis.

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Les actionnaires en profitent bien sûr, comme l’écrit la NZZ. Novartis a quadruplé le versement de ses dividendes depuis 2004 et Roche les a plus que quintuplés.

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Le marketing est un secteur d’activité plus important que la recherche

Le lobby pharmaceutique ne cesse de répéter que ces bénéfices sont nécessaires pour pouvoir développer de meilleurs médicaments. Cependant, des recherches ont démontré  que les dépenses de marketing des groupes pharmaceutiques dépassaient les dépenses de recherche.

Ce fait est connu depuis quelques années déjà : en 2018, l’oncologue Thomas Cerny écrivait dans « Le Temps » que les groupes pharma « consacrent en réalité bien moins de 20 % de leurs dépenses annuelles à la recherche et au développement ». Les 80 % restants seraient donc dépensés pour le marketing, la production ou bien « les salaires exorbitants de leurs dirigeants ».

Les groupes pharmaceutiques savent qu’il s’agit d’un point sensible. C’est pourquoi ils ne publient plus aujourd’hui leurs coûts de marketing et de distribution. Depuis 2022, Roche refuse par exemple toute transparence dans ce domaine. Jusqu’alors, les chiffres montraient que le groupe dépensait nettement plus pour le marketing et les dividendes que pour la recherche.


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