Ce qui était à l’origine une plateforme pour le couchsurfing occasionnel est aujourd’hui un modèle commercial lucratif. Dans de nombreuses villes, des investisseur-euses achètent des immeubles entiers pour les louer à des prix élevés via des plateformes telles qu’Airbnb ou booking.com pour des séjours de courte durée. Souvent, cela se fait sans déclaration officielle et sans paiement d’impôts, au détriment de ceux qui ont besoin de ces logements pour vivre.
L’effet Airbnb : Zurich montre ce qui se passe sans règles
À Zurich, on constate clairement à quel point le marché du logement évolue en l’absence de règles claires : selon les chiffres officiels, plus de 2 % de tous les appartements y sont déjà répertoriés sur des plateformes telles qu’Airbnb, et même plus de 6 % dans les quartiers particulièrement prisés. Conséquence : les logements se font de plus en plus rares, les loyers augmentent et les quartiers perdent leur caractère.
Afin de mettre un terme à cette évolution, le PS, en collaboration avec les Vert-es et un parti de gauche local (AL), a lancé début mars une initiative Airbnb. Celle-ci vise à limiter les locations de courte durée à 90 jours par an au maximum. Les personnes souhaitant louer temporairement leur chambre en colocation pendant un séjour linguistique pourront donc continuer à le faire. L’abus de logements par des superhosts commerciaux devrait ainsi être efficacement limité.
D’autres localités suisses ont déjà mis en place des réglementations ou sont en train de le faire. C’est le cas, par exemple, des villes de Berne, Lucerne, Lausanne ou Genève. Cette dernière avait introduit en 2018 une limitation des locations à courte durée via des plateformes de 60 jours. Depuis 2019, cette limite est de 90 jours.
Des localités plus rurales s’opposent également à la location de courte durée. L’assemblée communale d’Unterseen dans le canton de Berne a ainsi clairement approuvé une initiative du PS visant à restreindre les locations de courte durée. La location est aussi limitée à 90 jours.
Cependant, à Genève, cette mesure n’est pas assez efficace : selon une enquête de la RTS, 44 % des offres sur Airbnb ne la respectent pas. De plus, le nombre de logements offerts par des agences spécialisées dans la location de courte durée a explosé. En 4 ans, cette part de biens disponibles pour plus de 90 jours est passé de 48 à 61 %.
Le gouvernement genevois plaide pour une régulation des plateformes au niveau fédéral. Jusqu’à présent, celles-ci ne sont pas obligées de fournir des informations concernants les propriétaires aux autorités. Sans cela, il est difficile d’agir.
Vienne prend des mesures
Un coup d’œil à Vienne montre que de telles réglementations peuvent être efficaces : la Chambre des travailleur-euses de Vienne estime qu’environ 14 000 appartements sont proposés sur Airbnb dans la ville. Ce chiffre est plutôt faible par rapport à d’autres villes européennes. En effet, depuis 2018, la règle suivante s’applique à Vienne : quiconque souhaite louer un appartement via des plateformes telles qu’Airbnb ou Booking ne peut le faire que s’il s’agit de son propre logement principal ou d’un logement autorisé à des fins commerciales.
De plus, depuis l’été 2024, la location est limitée à 90 jours par an. Il est donc toujours possible de louer son propre appartement ou une chambre en colocation pendant ses vacances.
Toute personne souhaitant louer plus longtemps doit obtenir une autorisation conformément à la loi viennoise sur le logement, qui n’est accordée dans les zones résidentielles que dans des cas exceptionnels. « Les appartements sont destinés à être habités et non à faire des affaires », déclare Kathrin Gaál, conseillère municipale chargée du logement et vice-maire de Vienne, membre du SPÖ.
En outre, la ville de Vienne a mis en place un groupe de contrôle spécial au sein de la police du bâtiment pour les locations de courte durée. Neuf collaborateur-ices y sont exclusivement chargés d’enquêter sur les cas suspects et de détecter les locations illégales. Les infractions sont passibles de sanctions pouvant aller jusqu’à 50 000 euros.
L’Autriche prévoit un registre en ligne pour les hébergements touristiques
Jusqu’à présent, les logements privés utilisés à des fins touristiques ne sont pas officiellement enregistrés en Autriche. C’est précisément ce que le gouvernement fédéral souhaite changer. Le registre en ligne prévu pour les hébergements touristiques vise à instaurer la transparence dans toute l’Autriche. Les villes pourraient ainsi savoir pour la première fois quels logements sont proposés sur des plateformes telles qu’Airbnb et si cela est légal.
Un tel registre pourrait également améliorer la situation en Suisse.
Des villes différentes, des solutions similaires
D’autres villes et pays européens prennent également des mesures : à Amsterdam, les particuliers ne peuvent louer leur appartement à des touristes que 30 nuits par an, tout autre usage étant considéré comme illégal. Paris mise sur une règle des 90 jours et un système d’enregistrement, tandis qu’au Danemark, la limite est fixée à 70 jours.
Barcelone a déjà pris des mesures plus drastiques. Les appartements ne peuvent être loués qu’avec une licence spéciale, qui est très difficile à obtenir. Depuis le début de l’année, cette licence est obligatoire dans toute l’Espagne. Plus de 65 000 appartements de vacances doivent désormais être retirés de l’offre d’Airbnb & Co. pour non-respect de ces règles.
Cet article est en partie repris de kontrast.at.