Jacques Dubochet : « Oui ou non aux armes nucléaires ? Je dis non ! »

Pourquoi la Suisse devrait-elle adhérer au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) de l’ONU ? Pour le prix Nobel de chimie Jacques Dubochet, la raison est claire : le danger est très réel.

Jacques Dubochet Armes nucléaires
Image : mise à disposition/keystone/SCIENCE PHOTO LIBRARY SPL

« direct » : Pourquoi devons-nous adhérer au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ?

Jacques Dubochet : Le danger d’un conflit nucléaire est très réel. Selon le «Bulletin of the Atomic Scientists », il est même plus grand que jamais. Avec Trump et Poutine, la situation est extrêmement dangereuse. C’est pourquoi il est crucial que nous nous engagions maintenant toutes et tous en faveur de l’interdiction des armes nucléaires et que le Conseil fédéral signe enfin ce traité.

« Signer ce traité est la moindre des choses que la Suisse puisse faire. »

Prix nobel et activiste pour le climat

Le biophysicien suisse Jacques Dubochet a reçu en 2017 le prix Nobel de chimie pour le développement de la cryo-microscopie électronique (avec deux autres scientifiques). Il est depuis toujours engagé politiquement et a siégé plusieurs années au parlement municipal de Morges. Il défend avec passion la protection de l’environnement et du climat, notamment dans le cadre de l’initiative pour la protection des glaciers et des Grands-Parents pour le climat Suisse. Il est membre du comité d’initiative pour l’interdiction des armes nucléaires.

« direct » : Poutine a remis la dissuasion nucléaire à l’ordre du jour, y compris en Europe. Une interdiction est-elle possible ?

Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est en vigueur. Mais les puissances nucléaires ne l’ont pas signé. En conséquence, il ne produit qu’un effet relatif, comme d’autres traités internationaux. Mais l’histoire a montré que les traités internationaux revêtent une grande importance, même s’ils n’ont pas la portée que l’on souhaiterait. Signer ce traité est la moindre des choses que la Suisse puisse faire. Il n’y a pas grand-chose de plus à dire. Oui ou non aux armes nucléaires ? Je dis non!

« direct » : Un traité peut-il réduire la menace nucléaire ?

Personne n’a de baguette magique pour influencer Trump ou Poutine. Mais je trouve incompréhensible que le gouvernement suisse n’ait pas signé ce traité depuis longtemps. Cela me met vraiment en colère. Est-ce de l’indifférence, de la négligence ou de la bêtise ?

« La Suisse devrait investir moins dans l’armée et plus dans la promotion de la paix et dans une Suisse solidaire. »

« direct » : Vous vous engagez depuis longtemps en faveur des questions climatiques et environnementales. Pourquoi vous engagez-vous maintenant en faveur du traité sur l’interdiction des armes nucléaires ?

Lorsque j’étais doctorant à Bâle, j’ai participé à la création d’un journal qui s’est donné comme objectif de combattre l’industrie nucléaire et les armes nucléaires. C’était vers 1975. Autrement dit, mon engagement dans ce domaine ne date pas d’hier.

« direct » : Après des années de désarmement, on assiste aujourd’hui à un réarmement massif dans le monde entier.

Nous ne devrions pas augmenter les dépenses militaires. Nous devrions plutôt consacrer cet argent à de meilleures relations internationales et à l’engagement social. La Suisse pourrait jouer un rôle dans ce domaine, mais elle ne le fait pas – tout comme elle ne signe pas ce traité. L’argent investi dans l’armée manque ailleurs. La Suisse devrait investir moins dans l’armée et plus dans la promotion de la paix et dans une Suisse solidaire. Cela servirait sa position dans le monde, mais aussi à l’intérieur du pays.

Que demande l’initiative ?

Face à l’inaction du Conseil fédéral, le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a lancé, avec une large alliance, une initiative pour l’interdiction des armes nucléaires. Il veut ainsi inciter le Conseil fédéral à signer le traité d’interdiction des armes nucléaires de l’ONU. 93 États ont déjà signé le traité. Le Conseil fédéral refuse encore de le signer, bien que le Parlement se soit prononcé en faveur de sa ratification.


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